Le 19 juillet 1838, le bienheureux Père Louis-Edouard Cestac, fondateur des Servantes de Marie, est venu ici à Buglose, demander de l’argent pour son œuvre auprès des filles abandonnées de Bayonne. Il a obtenu cette réponse dans son cœur : « Ne me demande que mon esprit ». Le 19 juillet 1846 il vit ici une grande croix qui lui a été proposée. Le 19 juillet 2020, nous le savons tous, notre humanité est un mélange de bien et de mal, de grâce et de péché, de bon grain et d’ivraie, nous rappelle l’évangile qui vient d’être proclamé. Dans cette basilique, nous célébrons les 400 ans de la découverte de la statue de Notre-Dame de Buglose. Cachée dans les marais pour la protéger des guerres de religion, elle a donc été découverte dans la vase en 1620. Aujourd’hui, elle est dans la lumière de cette basilique qui brille de tous les projecteurs pour cette messe télévisée. C’est ainsi que des générations de pèlerins, comme Saint Vincent de Paul, sont venus ici pour obtenir une grâce de paix et de lumière. Ce sanctuaire constitue un havre d’espérance, d’unité, alors que notre monde semble si souvent divisé.
Les deux semeurs de la parabole de l’évangile ne sont pas à égalité : l’un a semé le bon grain en plein jour, son ennemi la nuit, lorsque les gens dormaient. Jésus ne nous suggère-t-il pas que le mal, celui qui est en moi, dans les autres, dans notre société, ce mal n’est pas notre vrai visage ? Il se glisse souvent à notre insu. Le mal sème la zizanie ! C’est d’ailleurs l’origine du nom, en grec, pour l’ivraie, une graine toxique qui a la réputation d’enivrer, de semer la discorde, la mésentente entre des personnes.
A la question des serviteurs : « Veux-tu donc que nous allions l’enlever ? », le maître répond : « Non, en enlevant l’ivraie, vous risquez d’arracher le blé en même temps ». C’est Dieu qui se réserve le jugement à la fin, au temps de la moisson. En attendant, il nous demande de ne pas juger. Il est plus patient que nous. Il supporte momentanément l’ivraie. Nous sommes tous bénéficiaires de cette patience de Dieu. Jésus sait que le bon grain ne périra pas, malgré les craintes légitimes que nous pouvons avoir. A tout être humain, à tout pêcheur, Dieu donne la chance d’un mûrissement possible. Déjà la première lecture, tirée du livre de la Sagesse, disait de Dieu qu’il juge avec indulgence, qu’il nous gouverne avec beaucoup de ménagement. Il nous permet, suivant le message de Notre-Dame de Buglose, de passer de la vase à la lumière.
Alors quelle est la meilleure manière d’éviter de faire le mal ? Il suffit de faire le bien. Tout agriculteur sait que là où le blé monte vite et bien, sa seule vitalité et densité élimine déjà la mauvaise herbe. La statue de Notre-Dame de Buglose a été cachée dans un lieu où on pensait qu’on ne la retrouverait sans doute jamais. Mais le Seigneur a ses desseins, qui nous échappent bien souvent. Lorsqu’elle a été retrouvée l’évêque de Dax voulait la récupérer et il a compris qu’il fallait que cette statue reste ici, dans ce lieu éloigné de tout à l’époque. Faire le bien, ce n’est donc pas uniquement vivre selon nos idées, mais c’est surtout suivre la volonté de Dieu.
Ainsi acceptons de quitter la vase qui est toujours à nos pieds pour aller vers la lumière. Mais pour quitter la vase, il faut que je trouve du sens à mon existence, que celle-ci soit attirée par le bien, par la lumière. Il faut aussi que je puisse durer pour rester dans la lumière, celle de l’Esprit-Saint qui vient au secours de notre faiblesse, nous rappelle la seconde lecture, la lettre de St Paul aux Romains. L’Esprit-Saint intercède pour nous, il ne nous adresse pas une lumière qui éblouit, mais qui indique le chemin de la sainteté. Ce n’est pas en semant la zizanie que je construis un monde de paix et d’amour. La sainteté se trouve dans l’accueil de Dieu, de son esprit. C’est aux moissonneurs d’arracher eux-mêmes l’ivraie, ce n’est pas à nous. Laissons à Dieu le soin de la croissance. Alors au temps du jugement nous savons que Dieu aura les bras ouverts comme ça et que de toutes façons, ce sera comme ça !
Références bibliques : Sg 12, 13.16-19 ; Ps 85 ; Rm 8, 26-27 ; Mt 13, 24-30