Mes amis,
Au début de cette année, un frère de la communauté où je vis est décédé brutalement. Je me souviens comme il a été important de pouvoir découvrir sur son bureau, dans son bréviaire, dans son agenda des petits mots écrits de sa main, des prières recopiées qui soulignaient des réflexions qu’il se faisait, sa prière même. Cela nous a aidés à mieux le connaître en vérité.
Les textes que nous venons d’entendre sont de ces paroles qui nous livrent le désir profond de Jésus. Il nous y fait le cadeau de ses dernières volontés. Voilà son Testament. L’Amour qu’il est venu vivre au milieu des hommes pour leur montrer celui de Dieu ; il nous le confie comme notre ordre de mission désormais.
Dieu ne se verra, ne se fera connaître et reconnaître que si nous nous aimons les uns les autres. Quelle consécration ! Quelle responsabilité !
Nous voilà responsables du bonheur des hommes, et du bonheur de Dieu.
Consacrés par la Vérité, c’est sans doute cela que ça signifie ? Mission impossible dans notre monde d’aujourd’hui ? Ce monde où tant d’événements contredisent cette volonté d’Aimer, un monde qui crucifie encore.
Jésus prie son Père : Garde-les du Mauvais.
Sa prière est efficace :
son Amour fait regarder la mort en face : il anime aujourd’hui des soignants et des bénévoles pour accompagner les mourants ;
son Amour fait affronter la violence avec la force d’âme des martyrs : les moines de Tibhirine, Monseigneur Claverie en sont des témoins proches ;
son Amour rend les hommes et les femmes capables de vouer leur vie au service de leurs frères humains : je lisais ces jours-ci le témoignage d’assistantes sociales affrontées avec les exclus aux difficultés de notre société. Elles ne ménagent pas leurs peines. Je connais des infirmières libérales dont la générosité rayonne.
Par notre baptême, nous avons été marqués au front comme des témoins de la résurrection. L’Esprit nous rend capables de choisir l’Evangile comme programme de bonheur :
choisir de ne pas tout avoir et de partager du temps, du travail ou de l’argent, plutôt que d’accumuler des richesses et de consommer de l’inutile ;
choisir le service désintéressé plutôt que d’imposer un pouvoir ;
choisir d’accueillir tout autres plutôt que de cloisonner ma vie de relations ;
choisir d’envisager le pardon et de se réconcilier plutôt que d’entretenir la violence dans la rancune et la jalousie ;
choisir le respect des pauvres, la défense des faibles, le soutien des familles, la protection des étrangers, la condamnation de la domination exercée par l’argent, comme programme que l’on attend de ses élus.
Voilà quels peuvent être les fruits, dans notre vie quotidienne, de la prise au sérieux du Testament que le Christ laisse à ses disciples. Voilà comment nous rendrons visible l’Amour de Dieu en nous pour tous les hommes.
Pour en avoir la force, faisons nôtre la prière qui faisait le secret de la sainteté du bon Père Garicoïts, le saint de Bétharram :
"O Père, vous m’avez tant aimé, vous avez tant fait pour vous faire aimer de moi ; vous avez tant désiré, vous désirez tant que je vous aime !… Me voici, ô mon Dieu, me voici ; mon coeur est prêt, je ne me refuse à rien pour vous prouver mon amour. Que voulez-vous que je fasse ? Me voici !"
Ce secret peut-il devenir le nôtre ?
Laissons-nous gagner aujourd’hui par la contagion heureuse qui brûle les témoins de la résurrection : l’Amour de Dieu est vainqueur. Le Christ, vivant, ouvre toutes les audaces pour ceux que l’Amour met en route.
Dans cette Eucharistie qui nous rassemble, en mémoire de lui, accueillons la joie dont il veut combler ses amis ; partageons le pain de la tendresse ; ouvrons-nous au bonheur que saint Michel donne mission à ses frères de procurer à tous.
Ainsi, la prière du Christ continuera d’être exaucée pour nous.
Références bibliques :
Référence des chants :